Pascale entre dans mon bureau, et je ne lui dis rien. Hier soir, elle a éclaté tout dans sa chambre parce qu'une fois de plus, elle n'a pas supporté qu'on lui dise « non » à une de ses multiples demandes. Donc, elle entre et je boude . Elle s'assied sans rien dire,les 2 coudes se posent sur le bureau et la tête ainsi soutenue dans ses mains, elle me regarde travailler. Interpellant, ce regard, mais je ne cède pas. Au bout d'un moment, elle attrape mon roller effaceur et un prospectus, et se met à effacer des lettres. Au psychologue qui passe la tête à la porte pour dire bonjour, je dis ; « tu as vu, c'est magique, cet engin, ça efface les conneries que l'on a faites ». Pascale ne dit rien, elle s'applique. Elle me tend ensuite le prospectus et se sauve. Un grand coeur est dessiné en blanc, avec mon prénom...
Un de mes professeur de pratique , dans mes études d'éducateur, me demande un jour quelle est la principale mission de l'éducateur vis à vis du jeune. Et moi de baragouiner alors quelque chose de l'ordre de l'accompagnement et de l'éducation. C'est, me dit-il alors « d'essayer d'en faire des êtres sociaux».
Notre quotidien est émaillé de paradoxes, de situations où la cohérence semble avoir déserté le réel. Aux situations « borderlines », dans lesquelles nous baignons, l'adéquation de réponses adaptées n'est pas toujours de mise, surtout quand les court-circuits ne se placent pas uniquement dans le relationnel au jeune, mais également dans l'incapacité de certains services extérieurs, voire de parents à entrer avec nous dans une dynamique de collaboration structurante...